Solidarité Haïti Estrie – Haïti vu autrement 

04 avril 2024

Cette chronique ne parle habituellement pas de la situation politique, car Solidarité-Haïti Estrie avec deux associations paysannes, construit un monde meilleur dans la section communale de Juanaria sur le Plateau central. Nous avons eu du succès dans ce domaine même si les difficultés permanentes d’Haïti en matière de politique ne nous ont jamais facilité la tâche.

Le chaos actuel m’amène cependant à vous parler de ma vision d’Haïti. Je ne suis ni un politicologue, ni un diplomate, ni un expert, mais après 21 ans de présence régulière sur le terrain, voici ma vision de la situation.

Haïti n’a pas suffisamment d’écoles primaires, encore moins d’écoles secondaires, de collèges et les universités sont rares et inaccessibles à la plupart des budgets. Haïti n’a pas non plus de réseau routier adéquat, ni chemin de fer. La vaste majorité des paysans marchent pour se déplacer.

Haïti manque aussi de soins de santé adéquats et accessibles. Elle a des problèmes d’accès à l’eau potable et de déforestation. En somme, le pays manque des principaux outils de développement, comme une administration saine de la nation. 

Haïti manque aussi cruellement d’élites, car les diasporas américaine, canadienne et européenne lui ont pris ses enfants parmi les plus talentueux. De plus, les politiciens au service des plus riches maintiennent le salaire minimum à moins d’un dollar de l’heure.

Pendant que les États-Unis font du dumping d’un riz contaminé à un prix dérisoire, tuant ainsi la vitalité des riziculteurs haïtiens, de l’autre main, ils tolèrent que le pays soit une plaque tournante pour le trafic de drogue, donc un repère de criminels.

Le peuple haïtien est admirable de résilience, de courage, de sourire, de joie de vivre, d’artistes (peintres, acteurs, cinéastes, musiciens, chanteurs, etc.) de courageux journalistes et de simples humains venant au secours de leur prochain par altruisme. Ce pays est l’enfant du racisme et de l’esclavage et pourtant, c’est de ce terreau que doit naître la nation car un peuple ne peut faire fi de son histoire.

Le Canada devrait mettre sur pied une politique à long terme pilotée par le Sénat, pour éviter que le prochain gouvernement lui tourne le dos. Cette politique devrait viser quelques cibles essentielles : un accès à Internet dans le but d’offrir un accès à l’éducation généralisé ; l’accès au crédit via des Caisses d’économies populaires ; l’électrification grâce au solaire ; la création de forêts nationales au bénéfice de l’ensemble de la planète et une démocratie construite à partir du plus reculé des villages, car Port-au-Prince n’est pas Haïti, il est important d’en prendre conscience.

Le palais présidentiel, symbole du potentiel politique, s’est écroulé en 2010. Construisons ailleurs un nouveau centre névralgique qui serait le symbole de la volonté de ce peuple de se gérer autrement. Agissons, en misant sur le dynamisme paysan.

Par Jean Charron