Texte d’opinion – Agrandissement du parc national du Mont-Orford

07 mars 2023

Hier soir, journée de La Saint-Valentin et de l’amour, avait lieu la première consultation publique sur l’agrandissement du parc national du Mont-Orford à l’hôtel Chéribourg. Cette présentation était organisée par le Bureau des audiences publiques sur l’environnement (BAPE), sous la présidence du commissaire, monsieur Antoine Morissette et de sa collègue, madame Mireille Paul.

Je n’avais jamais assisté à des audiences du BAPE, donc je me suis dit que c’était une excellente occasion pour comprendre le déroulement de ces séances puisque ce projet m’interpellait directement en tant que résident de la zone limitrophe de l’agrandissement du parc. Ce fut une expérience mémorable, digne des meilleures chorégraphies visuelles et orales de notre gouvernement.

D’entrée de jeu, je dois féliciter monsieur Morissette qui a dirigé de main de maître cette soirée avec rigueur, souplesse et autorité. Le parterre des intervenants était impressionnant : en plus des deux commissaires, siégeaient à leur droite comme à leur gauche, une vingtaine de spécialistes, scientifiques et politiciens du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP), de la Société des établissements de plein air du Québec (SÉPAQ), ainsi que de représentants des Municipalités régionales de comté (MRC) et des municipalités impliquées. Ça prend beaucoup de fonctionnaires pour faire un vrai gros spectacle.

À la demande du président d’assemblée, le MELCCFP a fait une présentation de son concept d’aménagement des différents secteurs de l’agrandissement du parc, avec présentation visuelle très bien léchée. Je dois avouer que le travail de ces professionnels est impeccable et que le projet en soi est de très grande valeur. Plusieurs activités y seront proposées pour la mise en valeur et la protection de la faune et de la flore du territoire, en facilitant l’accès aux visiteurs à une panoplie d’activités récréotouristiques.

Le problème principal de ce projet est qu’il se situe en zone habitée par des gens qui y vivent depuis 50-60 ans et qui ont pris un grand soin du milieu, sans fanfare ni trompette, mais avec beaucoup de respect pour tout cet écosystème fragile. L’agrandissement du parc ne se fait pas sur une banquise dérivant doucement au Nord-est de Terre-Neuve ; il se situe là où des gens vivent et protègent déjà leur environnement, car ils ont compris bien avant la création du MELCCFP que les gens peuvent cohabiter avec la nature, mais doivent aussi la protéger, car elle est fragile. Dans tous les secteurs de l’agrandissement, de vrais humains vivent et comprennent déjà sans besoin de grandes explications scientifiques qu’ils doivent protéger le milieu pour que les prochaines générations en profitent.

Après la présentation du concept d’aménagement, le commissaire a donné la parole aux résidents du territoire. Une douzaine de personnes ont pu exprimer leurs craintes vis-à-vis de tel ou tel aménagement dans un secteur ou l’autre et poser chacun deux questions courtes aux experts. C’est à ce moment que le festival de la langue de bois a débuté. Les spécialistes commençaient régulièrement par : « Je peux vous donner un début de réponse, blablabla, mais je passe la parole à M. ou Mme X qui développera, blablabla… » Et la deuxième personne prenait le ballon au vol et le lançait à une troisième, etc. Même le président était souvent mêlé dans ses explications qui n’ont jamais été claires. Aucune des vingt questions n’ont été répondues clairement et honnêtement. Les deux cents quelques participants à l’assemblée sont sortis déçus de voir que le rouleau compresseur de l’État avait bien joué son rôle de pseudo-écoute des citoyens.

Pour le MELCCFP et la SÉPAQ, les audiences du BAPE sont une contrainte (lire « misère ») incontournable pour se donner bonne presse et puis, on passe à autre chose en fignolant juste un petit peu le concept d’aménagement pour pouvoir clamer que la population a été entendue et qu’on a répondu au meilleur.

En conclusion, cette séance d’information du BAPE a été surréaliste, probablement inutile et le MELCCFP et la SÉPAQ continuent leur petit bonheur de chemin en privilégiant les spécialistes plutôt que le vrai monde habitant le milieu. Ça ne vous rappelle pas la création du parc national Forillon en Gaspésie, magnifique pour les visiteurs, mais combien destructif pour les gaspésiens.

André Cousineau, Saint-Denis-de-Brompton